Éloquence: retour en force d’un art millénaire
Préparer un oral ou un entretien d’embauche, devenir entrepreneur ou faire l’Olympia ? L’éloquence est une compétence essentielle. Elle repose sur la capacité à savoir s’adapter à un sujet, un public ou un contexte.
Publié le 29/04/2020 — Temps de lecture 3 minSerait-ce la fin de la pensée PowerPoint ? L’art de l’éloquence semble revenir en force. Il a semblé parfois délaissé ces derniers temps, au profit d’autres supports de la parole, notamment les présentations visuelles sur ordinateur. L’éloquence a aussi subi la baisse de popularité des cours magistraux, que la tendance actuelle de l’enseignement ne risque pas d’améliorer.
Devant 250 000 personnes, Martin Luther King prononce le 28 août 1963 un des discours les plus éloquents de l’Histoire et... en bonne partie improvisé. (Photo © DR)
Un pilier de la communication
Pourtant, on constate en cette période de COVID-19 que, en ce qui concerne le baccalauréat, seules les épreuves orales ont été maintenues : il semblerait donc que l’on n’ait pas tout à fait perdu de vue l’importance de l’éloquence. Cet art consiste à savoir s’adapter. S’adapter au public, au contexte, au sujet. Cela signifie analyser de nombreux facteurs sociaux, physiques et émotionnels, qu’il n’est pas toujours évident de cerner, mais qu’il serait regrettable de négliger.
Sans lui donner ce nom, Aristote parlait déjà d’éloquence. On trouve dans la Rhétorique des éléments constitutifs de l’éloquence : l’ethos, le pathos et le logos. Cette trinité a une importance toute particulière dans l’art de manier les mots, comme le prouve sa longévité. Aujourd’hui encore, ces trois éléments gardent toute leur cohérence et constituent une partie des piliers de la communication
Crédibilité du discours
Pour impacter ses interlocuteurs, il est essentiel de respecter ces trois éléments :
Ethos : le rapport entre soi et l’interlocuteur, qui varie en fonction de l’autorité et de la légitimité de chacun ;
Pathos : la capacité à jouer avec les sentiments de ceux à qui l’on s’adresse, avec leur psychologie, avec l’empathie que l’on parvient à créer ;
Logos : l’utilisation d’éléments logiques, précis, concrets, qui apportent de la crédibilité au discours.
Bien entendu, il s’agit aussi de faire sienne la langue française, de manier les mots —parfois avec malice— et de jouer avec les figures de style. On doit à Louis Bourdaloue (1632-1704), un prédicateur considéré comme l’un des fondateurs de l’éloquence française, des formules telles que : “L’ami de tout le monde n’est ami de personne” ou “L’avantage qu’on a d’être quelque chose dans le monde n’est qu’un engagement à n’y être rien pour soi-même, afin d’y être tout pour les autres”.
Illustration © Paul Gasselin
Battles de rap
Loin d’un art en perdition, l’éloquence connaît un important regain de popularité. En témoigne une émission comme “Le Grand Oral”, diffusée sur France 2 et qui a réuni cette année 1,4 millions de téléspectateurs. Ou encore le film Banlieusards” réalisé par Kery James, visionné par 2,6 millions de foyers internationaux en une semaine sur la plateforme Netflix. Le succès constant des joutes oratoires ou des “battles” organisées par la ligue Rap Contenders en sont également un bon exemple.
Reste une condition sine qua non pour le bon exercice de l’éloquence : la liberté d’expression. Sous la bannière HETIC Newsroom, un concours d’éloquence va être proposé dans les jours à venir aux héticiens. Chacun sera invité à s’exprimer librement, à libérer son art et son aura. Pas besoin d’être un pro de l’éloquence pour se lancer dans ce défi. Il faut seulement vouloir tenter sa chance. Envie de vous mesurer à vos camarades ?
[Article réalisé avec le précieux concours de Priscille Marty, intervenante à HETIC]
Quelques liens sur l'éloquence :
Arthur Schopenhauer, L’Art d’avoir toujours raison